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Invitation à l’éveil

Elle a vécu pendant des années les affres de la dépression avant d’en sortir un matin, inexplicablement, forte d’une incroyable lucidité. Depuis, Byron Katie, rayonnante et métamorphosée, partage ce cadeau avec ceux qui viennent à sa rencontre.
Byron Katie

© Seignette Lafontan

Resplendissante, debout sur scène depuis plus de deux heures – alors qu’elle est âgée de 73 ans –, Byron Katie répond aux questions du public. « Lorsque nous arrivons à sortir de l’ego, comment pouvons-nous continuer à avoir des relations ? », demande quelqu’un. « Je vous souhaite bonne chance avec le fait de sortir de l’ego ! », répond-elle en riant. Ah ? Pourtant, les maîtres éveillés ne nous disent-ils pas qu’il faut abandonner l’ego ? Alors, qui est cette femme qui, avec une incroyable finesse, nous fait comprendre les nuances de ce que veut dire « s’éveiller à la réalité» ? Byron Kathleen Reid grandit à Barstow, une petite ville du désert californien. Jeune femme, elle se marie, fonde une famille, et se découvre un talent pour les affaires immobilières. Elle flaire quoi acheter, quoi revendre et à quel moment. Elle travaille intensément et le sens de sa vie d’alors est surtout de s’occuper de ses trois enfants. Seulement, à l’âge de 33 ans, elle sombre dans une terrible dépression. « C’était fou. Je suis devenue extrêmement angoissée. Tout me faisait réagir. J’ai éprouvé la douleur, les ténèbres, pendant plus de dix ans », confie-t-elle. Elle gère ses affaires depuis sa chambre, qu’elle ne quitte que rarement. Sa famille essaie de l’aider, mais se sent démunie. « Jamais je n’aurais pensé suivre une thérapie, ces choses-là étaient loin de moi », précise-t-elle. Suicidaire, Byron Katie est finalement admise dans un centre de réadaptation pour femmes souffrant de troubles de l’alimentation.

Remplie d’amour

Au bout d’une dizaine de jours, Byron Katie se réveille, allongée par terre – elle se sentait indigne de dormir dans un lit. Et tout a disparu… Absolument tout. « Il n’y avait plus d’angoisse, plus de douleur, plus de rage ni de tristesse. Un grand rire est monté du plus profond de moi. C’est comme si quelque chose d’autre s’était éveillé. “Ça’’ m'avait ouvert les yeux. ‘‘Ça’’ regardait à travers les yeux de Katie et “ça” était totalement ravi », rapporte-t-elle. À ce moment-là, elle comprend que la souffrance est optionnelle. Lorsqu’elle croit en ses pensées, elle souffre, et lorsqu’elle n'y croit pas, il n’y a aucune souffrance en elle. Nous sommes alors en février 1986, et Byron Katie est âgée de 43 ans. L’expérience est si radicale qu’il n’y aura pas de retour en arrière, ni même besoin de piqûre de rappel. Sa famille, plutôt effrayée, a l’impression de se retrouver face à une autre personne.


Il n’y avait plus d’angoisse, plus de douleur...

Il a fallu du temps à Byron Katie pour s’adapter à ce nouvel état. « Elle restait des heures immobile, assise près de la fenêtre ou dans le désert. Elle était joyeuse et innocente, comme une enfant, et semblait remplie d’amour », témoigne sa fille Roxann. Petit à petit, Katie arrive à partager de manière plus explicite ce qui lui arrive. Des personnes en détresse – qui ressentent sa présence tranquille, son attentive et constante invitation à l’éveil – commencent à frapper à sa porte pour lui demander de l’aide. « Au début, je disais que je ne savais pas quoi répondre. C’était très difficile car rien de ce que je pouvais dire n’était vrai ! Comment dire une vérité sans pouvoir la dire ? Mais les gens voulaient quand même que je leur parle. Alors, j’ai essayé de les guider pour qu’ils trouvent leur vérité », explique-t-elle.


Le « Travail »

Byron Katie prend le temps de s’asseoir avec ceux qui viennent à elle, d’écouter leurs problèmes, et de leur demander : « Est-ce vrai ? », « Pouvez-vous savoir de manière absolue que c’est vrai ? » Puis elle interroge : « Comment réagissez-vous quand vous croyez cette pensée ? » Avant de demander, enfin : « Qui seriez-vous sans cette pensée ? » Ces quatre questions forment le socle de ce qu’elle appellera par la suite « le Travail » (the Work, en anglais). Elle propose aussi aux personnes d’effectuer des « retournements » – une façon de ressentir l’opposé de ce que l’on croit. Par exemple, si je crois que mon ou ma partenaire m’aime pour de mauvaises raisons, un retournement possible serait : « Il ou elle m’aime pour de bonnes raisons. » Ensuite, je trouverais des exemples précis et authentiques de la vérité de cette phrase. Un autre retournement pourrait être : « Je l’aime pour de mauvaises raisons. » Un troisième retournement serait : « Je m’aime pour de mauvaises raisons. » Cependant, est-ce que tout cela est vrai ? Simple mais puissant, le Travail de Byron Katie va prendre une envergure surprenante. Sa maison devient le refuge de personnes qui y séjournent plus ou moins longtemps. Elle est progressivement conviée à parler dans des réunions organisées chez les uns et les autres, puis dans diverses salles de conférences – des invitations qu’elle ne refuse jamais. En 2002, elle publie son premier livre, Aimer ce qui est, Quatre questions qui peuvent tout changer dans votre vie. Aujourd’hui, ses trois best-sellers sont traduits en trente-deux langues. Elle a présenté son Travail à des millions de personnes de par le monde. Son approche a été adoptée par des hôpitaux, des écoles, des universités, des prisons, des entreprises…


"Finalement, tout le monde se prend les pieds dans les mêmes tapis..."



Vivre l’expérience

La force de Byron Katie est de penser que la seule façon de comprendre le Travail est d’en faire l’expérience. Ainsi, elle ne cherche pas à donner des conférences qui fourniraient une explication intellectuelle ou une solution préconçue. Elle offre des temps de partage qui permettent un accompagnement attentif et pratique. Les personnes du public sont invitées à remplir des formulaires et à y écrire les problèmes dont elles pensent souffrir. Celles qui le souhaitent peuvent monter sur scène et travailler avec Byron Katie. À partir de leur histoire concrète, elle les guide, de manière douce et inébranlable, vers un questionnement de leurs croyances. Et que découvre le public qui assiste à ce questionnement ? Que, finalement, tout le monde se prend les pieds dans les mêmes tapis. Lorsque quelqu’un parle de son ressenti d’injustice, d’abandon, de tristesse, d’impuissance, de colère, dans ses relations familiales, sociales ou professionnelles, la résonance est telle que tout le monde peut souvent retrouver une situation semblable dans sa propre histoire. « Mais tout cela est-il vrai ? », ne cesse de répéter Byron Katie. Ainsi, patiemment, et depuis plus de trente ans maintenant, celle qui s’est « éveillée à la réalité » nous invite à démanteler ce qui nous fait souffrir. Pense-t-elle à prendre sa retraite ? « Je ne prends pas ce genre de décision. Je ne vois pas ce qui pourrait m’empêcher de faire le Travail », affirme-t-elle. À certains moments, Byron Katie a perdu la vue, ou s’est retrouvée incapable de marcher. Là encore, elle ne peut fournir aucune explication sur ce qui s’est passé. Cela ne l’a pas empêchée de continuer ses tournées, accompagnée de son mari actuel, l’écrivain Stephen Mitchell.



« L’EGO VEUT ÊTRE “QUELQU’UN”, ALORS QU’IL N’EST RIEN… »


Que cherchez-vous à transmettre ? Byron Katie : J’essaie d’amener les gens à comprendre que ce que nous croyons crée la seule réalité que nous allons rencontrer. Nous nous identifions tellement aux préjugés et aux jugements que nous avons sur nous-mêmes, les autres, le monde ! Mais lorsque nous questionnons ces croyances, elles perdent leur substance. Ça devient comme une évidence, et c’est incroyablement libérateur de voir que ce qui crée notre souffrance n’a aucune substance. D’une certaine manière, le Travail est un antivirus ! Donc, il faut rester conscients de ces illusions qui nous traversent et voir qu’au-delà, il y a une beauté incroyable, un miracle, un cadeau. Vous pouvez alors vous asseoir dans une sorte d’émerveillement, et vous n’avez pas besoin de « savoir » quoi que ce soit.


"Vous pouvez alors vous asseoir dans une sorte d’émerveillement..."



Quelle vision avez-vous de l’ego ? B. K. : Quand j’étais allongée par terre, le jour où j’ai « vu » tout cela, je ne savais même plus qui j’étais. Je voyais que mon ego est une illusion. Mais l’esprit créatif ne s’arrête jamais. Et l’ego n’est pas un ennemi dont il faut absolument se débarrasser. Le boulot de l’ego – qui pourtant n’existe pas – est d’être une « chose identifiée » à tout prix. Il veut être « quelqu’un », alors qu’il n’est rien. Mais plutôt que d’essayer de le fuir ou de l’arrêter, il est beau de le rencontrer tel qu’il est et non comme un ennemi ! L’ego est un joueur incroyable ! Il est comme un enfant qui ne cesse de s’amuser. Il n’y a rien de sérieux dans tout ça. Ce n’est qu’une illusion, mais c’est le seul jouet disponible. Alors il y a un jeu. Pas d’ego, pas de vie, pas de monde. S’éveiller à cette réalité-là est magnifique. Tout ce qui compte est, au final, quelque chose qui n’est pas, et qui ne peut être. Ainsi, l’histoire recherchée est l’histoire de quelque chose dont tous nos mots ne pourront jamais parler, parce que c’est au-delà de tout. Vous comprenez la difficulté ? Dès que vous parlez, vous êtes dans l’ego. Il faut juste le savoir, et ne pas s’identifier.



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